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Technologie

Publié le 12 déc 2023Lecture 7 min

Prise en charge des métastases osseuses et des parties molles en radiologie interventionnelle : combinaison des techniques durant la même procédure

Sylvain GRANGE, Rémi GRANGE, Radiologie interventionnelle, CHU de Saint-Étienne

La progression des techniques d‘imagerie et la miniaturisation du matériel interventionnel ont permis le développement récent de nombreuses techniques interventionnelles mini-invasives. Cette « boîte à outils » désormais à disposition du radiologue interventionnel permet d’optimiser la prise en charge des métastases osseuses. Ces dernières sont très fréquentes et à l’origine de douleurs importantes, de fractures et leurs conséquences sont notamment l'alitement et l'altération de la qualité de vie des patients. Ces métastases osseuses sont de plus en plus fréquemment rencontrées, en lien avec l’augmentation de l’espérance de vie de la population, à la fois de la population générale mais aussi particulièrement celle des patients cancéreux au stade métastatique. Les actes mini-invasifs de radiologie interventionnelle sont particulièrement adaptés à cette population, à la fois souvent âgée et fragile.

Les avantages des procédures de radiologie interventionnelle, notamment en oncologie ostéo-articulaire, sont le caractère très peu invasif des procédures, permettant une récupération rapide après intervention. Elles permettent de limiter l’arrêt des traitements spécifiques du cancer (immunothérapie, chimiothérapie, radiothérapie, etc.). Ces interventions ont pour objectif de réduire la douleur, de stabiliser ou prévenir les fractures, d’éviter le décubitus et donc d’améliorer la qualité de vie des patients. Elles permettent une remise en charge précoce des patients, le tout avec une courte période de récupération post-intervention. L’acte de radiologie interventionnelle ostéo-articulaire en oncologie est décidé en réunion de concertation pluridisciplinaire dédiée « douleur et cancer », en concertation avec les oncologues, les radiothérapeutes, les médecins de la douleur et les chirurgiens. Le choix de la technique dépendra de plusieurs facteurs : l’emplacement, la taille et le nombre de métastases osseuses, les douleurs (intensité, caractère mécanique ou inflammatoire, etc.), l’état de santé général du patient et le projet thérapeutique. Le patient est rencontré en consultation de radiologie interventionnelle avant le geste, les modalités du geste (moyen de guidage, matériel utilisée, mode d’anesthésie, etc.), l’objectif thérapeutique mais aussi les risques potentiels sont alors abordés. Différents moyens de traitement sont ainsi à disposition du radiologue interventionnel pour la prise en charge des métastases osseuses.   La thermoablation C’est une technique médicale qui utilise la chaleur (radiofréquence : RF 3000 de Boston Scientific, micro-onde) ou le froid (cryothérapie : ICEfx Boston Scientific) pour détruire les cellules cancéreuses, tout en préservant les tissus sains environnants. Les intérêts de la thermoablation sont de pouvoir obtenir un contrôle tumoral local, utile à la fois dans une logique soit curative, soit palliative. Elle a aussi un intérêt antalgique, notamment pour les lésions à l’origine de douleurs inflammatoires. Il existe également un intérêt au préalable de la réalisation d’une cimentoplastie, pour les lésions très tissulaires, la thermoablation permettant de créer une cavité et donc d’éviter les risques de fuite de ciment « hors cible ». Les méthodes de thermoablation les plus couramment utilisées pour la destruction des métastases osseuses et des parties molles sont le traitement radiofréquence (RF 3000) et la cryothérapie (ICEfx Boston Scientific). La radiofréquence utilise des ondes électromagnétiques de haute fréquence pour chauffer et détruire les tissus ciblés. Un applicateur RF est inséré directement dans la zone à traiter sous guidage d’un moyen d’imagerie. Lorsque l’applicateur émet de l’énergie RF, les tissus sont chauffés à des températures élevées, ce qui entraîne la destruction des cellules. La cryoablation, quant à elle, utilise des températures extrêmement basses pour détruire les cellules cancéreuses. Une ou plusieurs sondes cryogéniques sont insérées dans la métastase sous guidage d’un moyen d’imagerie. La cryoablation permet en plus de suivre en direct la formation du glaçon et donc de pouvoir optimiser le traitement en direct. Les avantages de la thermoablation incluent sa minimisation de l’impact sur les tissus sains environnants, une récupération plus rapide et des procédures moins invasives et moins douloureuses que la chirurgie traditionnelle. De plus, elle permet une répétabilité possible des interventions, et peut être combinée avec la radiothérapie. Elle permet aussi la réalisation d’une biopsie au cours de la procédure, souvent très utile aux oncologues pour adapter le traitement. Les techniques de protection des organes, notamment des structures nerveuses par hydrodissection, autorisent également de traiter des lésions toujours plus difficiles.   Embolisation L’embolisation est utilisée pour réduire la vascularisation des métastases hypervasculaires. Elle peut être utilisée dans un but antalgique (notamment en cas de douleur inflammatoire), ou dans un contexte préopératoire (risque hémorragique). Différents agents embolisants (coils, colle, microsphères, gélatine résorbable) peuvent être utilisées, en fonction de la localisation, de la taille lésionnelle, de l’existence d’anastomoses, de l’objectif (antalgique ou préopératoire), et des habitudes du radiologue. En réduisant l’apport sanguin, l’embolisation provoque un manque d’oxygénation tissulaire, induisant ainsi une nécrose tumorale. Cette procédure est effectuée sous anesthésie locale ou générale. L’embolisation des métastases osseuses est peu invasive (simple ponction artérielle), à risque limité. Elle peut être utilisée en complément à d’autres traitements de radiologie interventionnelle.   Consolidation osseuse : ostéosynthèse, cimentoplasties, broches cimentées La cimentoplastie consiste en l’injection de ciment afin de renforcer les structures osseuses envahies par des métastases. Le ciment résiste aux forces de compressions, et peut être utilisé seul notamment au niveau du squelette axial. En revanche, Il résiste peu aux forces de torsion ou de cisaillement, raisons pour lesquelles la cimentoplastie est de plus en plus couplé à une ostéosynthèse percutanée (mise en place de vis ou de petite broches cimentées). La combinaison de ces techniques reste peu invasive, les incisions cutanées restant toujours infracentimétriques. Ces procédures sont efficaces pour réduire la douleur liée aux lésions tumorales en elle-même mais aussi à l’affaiblissement osseux causé par les métastases. Elles permettent une stabilisation osseuse immédiate, préviennent le risque fracturaire et favorisent la mobilisation précoce du patient. Comparée à la chirurgie, l’ostéosynthèse en radiologie interventionnelle est moins invasive, limite le risque infectieux et facilite la récupération, avec un lever et une marche précoce, et s’associe à une hospitalisation courte. Biopsie guidée par imagerie ll est parfois nécessaire de réaliser une biopsie guidée pour confirmer le type de cancer et sa sensibilité aux traitements spécifiques. Elle permet aussi de pouvoir prélever un fragment de tumeur (biopsie) pour l’analyser. Ce geste à but diagnostique, rapidement réalisé en début de procédure, est une aide souvent précieuse pour l’oncologue afin d’optimiser la prise en charge spécifique du cancer.   Figure 1. Prise en charge d’une volumineuse métastase douloureuse de l’aile iliaque gauche chez un patient de 74 ans atteint d’un cancer pulmonaire. Le scanner de planification (A, axial) permet d’identifier la lésion osseuse lytique de l’aile iliaque gauche avec un important envahissement des parties molles au contact (pointillés). Une biopsie des parties molles est réalisée. Par la suite, 4 aiguilles de cryoablation (Boston Scientific : IceFORCE®) sont mises en place au sein de la lésion tumorale (B, coronal), de manière à couvrir au mieux cette volumineuse tumeur de forme pseudo-ellipsoïdale. Les contrôles en cours de procédure (C et D, respectivement coronale et axiale) permettent de surveiller la taille et la forme du glaçon (pointillés) et de confirmer à la fois la bonne destruction tumorale osseuse et des parties molles, et l’absence d’extension aux structures nobles alentours, notamment nerveuses. Après la cryoablation, une consolidation osseuse est réalisée (E, sagittale), à but antalgique et préventive du risque de fracture, à l’aide d’une vis d’ostéosynthèse (tête de flèche) qui est mise en place de part et d’autre de la tumeur (pointillés) dans l’os sain ; ensuite, du ciment (flèches) est injecté à chaque extrémité de la vis afin de prévenir le risque de descellement. Figure 2. Prise en charge d’une métastase lytique douloureuse de l’aileron sacré gauche chez un patient de 69 ans atteint d’un cancer rénal. Le scanner de planification (A, axial) permet d’identifier la lésion osseuse lytique de l’aileron sacré gauche (pointillés) venant au contact de la première racine sacrée gauche (tête de flèche). Compte tenu du caractère hypervasculaire des métastases osseuses de primitif rénal, il est décidé de réaliser une embolisation préalable ; l’artériographie (B, scopie du bassin de face) montre le « blush tumoral » (flèche) et la lésion est embolisée à l’aide de microparticules. Une biopsie osseuse est ensuite effectuée (C, axiale), à la demande des oncologues, à la fois pour confirmer l’origine rénale de la lésion mais aussi pour adapter le traitement oncologique spécifique. Par la suite, une aiguille de cryoablation (Boston Scientific : ICESphere) est mise en place au sein de la lésion tumorale (D, axiale), à distance de la racine sacrée, pour nécroser la partie tissulaire de la lésion et éviter les fuites lors de l’injection ultérieure de ciment. Après la cryoablation, une consolidation osseuse est réalisée (E et F, axiales), à but antalgique et consolidatif (prévention du risque de fracture), à l’aide de deux vis d’ostéosynthèse, dont les extrémités sont situées de part et d’autre de la tumeur dans l’os sain. Les vis sont « montées sur le ciment » : on injecte le ciment dans un trocarts 8 Gauges, puis une broche est rapidement insérée dans le trocart, celui-ci est enlevé en laissant précautionneusement la broche, puis une vis est montée rapidement sur la broche. On retire ensuite la broche. Ainsi, le ciment (flèches) permet une adhérence parfaite entre la vis et les structures osseuses et permet d’éviter le risque de descellement, notamment en cas de progression tumorale ultérieure. Pour en savoir plus : • Cazzato RL, Garnon J, Jennings JW, Gangi A. Interventional management of malignant bone tumours. J Med Imaging Radiat Oncol 2023. Publication avancée en ligne : https://doi.org/10.1111/1754-9485.13587. • Bertholon S et al. Combination of percutaneous screw fixation and cementoplasty for lytic bone metastases: feasibility, safety and clinical outcomes. Cardiovasc Intervent Radiol 2022 ; 45(8) : 1129-33. • Deschamps F et al. Percutaneous osteosynthesis in the pelvis in cancer patients. Eur Radiol 2016 ; 26(6) : 1631-9. • Roux C et al. Fluoroscopy and cone-beam CT-guided fixation by internal cemented screw for pathologic pelvic fractures. Radiology 2019 ; 290 (2), 418-25. • Tomasian A et al. Comprehensive palliative musculoskeletal interventional radiology care for patients with cancer. Radiographics 2022 ; 42 (6) : 1654-69.

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