Publié le 20 avr 2023Lecture 5 min
LLC avec anomalies du gène MYC - Caractérisation génomique et signification pronostique
D’après la communication d’Élise Chapiro (Paris) du Groupe francophone de cytogénétique hématologique – SFH, 29-31 mars 2023
La cohorte TEACLL (Two Eight chromosomal Abnormalities in Chronic Lymphocytic Leukemia) est une étude du GFCH (Groupe francophone de cytogénétique hématologique) qui vise à caractériser les anomalies du gène MYC des leucémies lymphoïdes chroniques (LLC) afin de déterminer leur signification pronostique.
Les anomalies chromosomiques du gène MYC dans la LLC sont rares, liées au gain d’une ou plusieurs copies (5-6 % des cas) ou à une translocation de MYC avec partenaire IG ou non IG (< 1 %). La survie globale et le temps jusqu’au premier traitement sont diminués.
Ces anomalies du gène MYC sont souvent associées à des facteurs pronostiques défavorables [caryotype complexe, délétion 17p(TP53)].
La LLC « double-hit » à la fois del(17p) et gain MYC impacte négativement la survie globale versus une LLC del(17p)(1).
Il existe une coopération entre les anomalies MYC et TP53 :
• Gain MYC plus fréquent dans les LLC 17p (9 %-44 %)
• t(MYC) : fréquence de la del(17p) 3 fois plus élevée que dans la LLC en général (24 % versus 7 %)
• Co-existence fréquente del(17p) + gain MYC dans les transformations en Richter(2-8)
Les études concernant les LLC avec anomalies MYC sont très souvent de petites séries indépendantes (soit translocation, soit gain).
La finalité de la cohorte TEACLL (Two Eight chromosomal Abnormalities in Chronic Lymphocytic Leukemia) était de réunir une large cohorte rétrospective, afin de comparer gain versus translocation. Les objectifs sont d’établir une description cytogénétique et moléculaire (types d’anomalies chromosomiques caractère clonal/sous-clonal, identification des partenaires de MYC dans les translocations, associations aux autres altérations génétiques [caryotype complexe, del(17p), mutations…]) ; déterminer l’impact pronostique (analyse de la survie par comparaison à une cohorte de LLC contrôles ; corrélations clinico-pathologiques) ; étudier les conséquences fonctionnelles de ces anomalies sur l’expression de MYC et la sensibilité aux drogues in vitro.
L’étude a inclus 110 patients atteints de LLC avec anomalies du gène MYC, majoritairement des hommes (70 %), l’âge médian à la détection de l’anomalie MYC est de 68 ans ; l’anomalie MYC est confirmée par FISH. Les données cliniques concernent 108 patients : l’anomalie est présente au diagnostic ou avant traitement pour 68/108 patients ; l’anomalie est apparue après traitement pour 16/108 patients ; le stade d’apparition de l’anomalie n’a pas pu être déterminé pour 24/108 patients.
Au total, 53 % des patients avaient un gain MYC, 39 % des translocations t(MYC), 8 % avaient un gain + translocation MYC soit dans 2 clones différents, soit dans le même clone.
Parallèlement une cohorte de LLC contrôles sans anomalie MYC a été constituée (n = 155).
Concernant le gain MYC (n = 67), il s’agissait majoritairement d’une copie additionnelle.
Les anomalies chromosomiques qui conduisaient à ce gain MYC étaient dans 81 % des cas une translocation déséquilibrée avec une prédominance des t(8;8)/i(8)(q10), une duplication « simple » (6 patients), une duplication « complexe » (2 patients) et une trisomie 8 (2 patients). En fréquence, après le chromosome partenaire 8, c’est le chromosome 17 qui est impliqué le plus souvent avec la t(8;17).
Concernant les translocations MYC (n = 52), parmi les partenaires, 5 étaient non identifiés (caryotypes non informatifs, réarrangement sous-clonal), 3 cas avec deux translocations différentes, sur 50 translocations (22 concernaient un locus des gènes des immunoglobulines).
Par comparaison à une cohorte de LLC contrôle, les patients atteints d’une LLC avec anomalie MYC sont à un stade plus avancé (stade Binet), souvent avec un statut IGHV non muté, un caryotype complexe voire hypercomplexe, des anomalies de trisomie 12 moins fréquentes mais des délétions 11q(ATM), 17p (TP53), 8p et des gains 2p plus fréquentes, associées à un mauvais pronostic.
Le suivi de cette cohorte rétrospective est assez long, 9 ans pour les LLC MYC et 12 ans pour les LLC contrôles. On observe une diminution significative de la survie globale et un raccourcissement du temps jusqu’au premier traitement pour les LLC MYC comparativement aux LLC contrôles.
La comparaison des groupes LLC avec anomalies de MYC, gains versus translocations, aux anomalies génomiques : que ce soit pour les gains ou les translocations, il existe de façon équivalente la moitié d’anomalies MYC clonales et sous clonales ; dans le petit groupe de patients qui présentaient une LLC avec gain + translocation, l’anomalie MYC était majoritairement sous-clonale. Davantage de caryotypes non complexes sont observés dans les LLC translocation MYC et à l’inverse, plus de complexité caryotypique dans les LLC avec gain MYC, de même plus de del(8p) dans le groupe des LLC avec gain MYCen rapport avec la fréquence des translocations t(8;8). Plus de del(17p) (à la limite de la significativité).
Les LLC avec gain MYC et t(MYC) ont une survie globale similaire.
Le partenaire de MYC joue un rôle dans la survie globale des LLC t(MYC) : il existe une diminution de la survie globale des LLC t(MYC) avec partenaire IG par rapport aux LLC t(MYC) non IG ; en revanche, il n’y a pas de différence statistiquement significative entre ces 2 groupes en ce qui concerne le statut IGHV, la complexité du caryotype, la del(17p) ou autres anomalies cytogénétiques.
Le seul paramètre qui impacte significativement la survie globale des LLC avec anomalies MYC (translocation ou gain) est la présence d’une délétion 17p.
Conclusion
• Les anomalies du gène MYC sont associées à des facteurs de pronostic défavorable tels que le statut IGVH non muté, un caryotype complexe, la présence d’une del(17p), del(11q), del (8p), et gain 2p.
• Elles impactent significativement la survie globale des patients, que ce soit des LLC avec gain ou t(MYC).
• Le pronostic est encore plus défavorable si association à la del(17p) pour une LLC « double-hit » avec gain MYC + del(17p) ou t(MYC) + del(17p). Il faut rechercher les anomalies de MYC par FISH de façon systématique.
• L’étude objective le rôle sur la survie du partenaire de type IG dans les t(MYC) qui pourrait être en lien avec une surexpression de MYC plus importante.
• L’étude se poursuit avec :
– mesure de l’expression du gène MYC par ddPCR ;
– identification des gènes partenaires non IG des t(MYC) par cartographie optique du génome ;
– paysage mutationnel par NGS pour déterminer s’il existe un profil particulier de ces LLC ;
– étude in vitro de la sensibilité aux drogues anti-LLC sur cellules primaires : iBTK, iBCL2.
Sylvie LE GAC, Paris
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