Gynécologie & Sénologie
Publié le 18 nov 2022Lecture 3 min
Biopsie liquide et cancer du sein HR+/HER2+ - Pour une adaptation thérapeutique anticipée
Les résultats de l’étude PADA-1 montrent que la stratégie « biopsie liquide » avec analyse de l’ADN tumoral circulant en temps réel, permet d’adapter le traitement de façon anticipée dès la détection d’une mutation ESR1 chez des patientes traitées par antiaromatase et inhibiteur de protéines kinases CDK4 et 6 pour cancers du sein métastatique HR+/HER2-. Le switch de l’anti-aromatase par le fulvestrant permet de doubler la survie sans progression de manière significative chez ces patientes atteintes d’un cancer du sein métastatique hormonodépendant.
Le cancer est un processus dynamique, ses caractéristiques peuvent varier au cours du temps avec le développement de sous-clones. Le besoin d’analyser la tumeur régulièrement devient donc une nécessité au cours du suivi pour pouvoir adapter la stratégie thérapeutique lorsqu’il y a échappement c’est-à-dire progression de la maladie. Mais, souvent, les cliniciens se heurtent à la faisabilité et au risque de gestes invasifs répétés, tels que les biopsies à l’aiguille, les prélèvements endoscopiques ou par chirurgie ouverte. Une solution vient de récents progrès de la biotechnologie permettant de détecter et d’analyser de petites quantités de matériel, larguées par les masses tumorales dans le sang périphérique (ou l’urine, le LCR, la salive), sous forme de cellules malignes (cellules tumorales circulantes, CTC), de fragments libres d’ADN (ADN tumoral circulant, ctDNA) ou d’ARN, de protéines ou encore d’exosomes. Ces approches, regroupées sous le terme de « biopsies liquides », commencent à montrer leur utilité en clinique, et les attentes sont grandes, tant pour le guidage des traitements que pour le dépistage ou l’estimation du risque de rechute.
L’étude mondiale de phase 3, multicentrique, PADA-1 a utilisé la technique de « biopsie liquide » pour suivre l’apparition éventuelle des mutations ESR1 sur l’ADN tumoral circulant dans le sang de patientes (n = 1 017) présentant un cancer du sein métastatique HR+/HER2-. Ce suivi a été réalisé pendant le traitement de première ligne métastatique associant un antiaromatase (létrozole, anastrozole…) et un inhibiteur des protéines kinases dépendantes des cyclines (CDK) 4 et 6, le palbociclib, avant que ces mutations ne conduisent à une progression de la maladie.
En effet, les mutations activatrices du gène du récepteur aux estrogènes (ESR1) peuvent survenir en cours de traitement chez certaines patientes, menant à une résistance aux antiaromatases et, in fine, à une nouvelle progression du cancer.
Dans cette étude, lors de la détection d’une mutation ESR1, la moitié des femmes ont été tirées au sort pour changer l’hormonothérapie pour du fulvestrant associé au palbociclib, l’autre moitié restant sous létrozole et palbociclib selon le standard thérapeutique. Le changement anticipé d’hormonothérapie a engendré une amélioration significative de la survie sans progression qui a été doublée à partir de la détection de la mutation dans le sang (11,9 mois versus 5,7 mois) après un suivi médian de 26 mois.
« L’étude PADA-1 démontre pour la première fois l’efficacité d’un changement précoce d’hormonothérapie (antiaromatase remplacé par le fulvestrant) combiné au palbociclib dès la détection de la mutation ESR1 dans le sang des patientes. L’utilisation de la technique innovante de l’ADN tumoral circulant permet ainsi de changer le traitement avant que le cancer ne réévolue », a expliqué le Pr François-Clément Bidard, oncologue médical à l’Institut Curie et professeur à l’université de Versailles Saint-Quentin/Paris-Saclay.
Cette étude a été réalisée par l’intergroupe français d’Unicancer sur le cancer du sein (UCBG) en partenariat avec le groupe de recherche GINECO, tous deux labellisés par l’INCa. Cette étude académique a été financée par Pfizer. « Au-delà de l’impact dans le contexte clinique évalué, les résultats de l’étude PADA-1 ouvrent un pan entier et inédit de recherches visant à contrer les résistances acquises aux traitements antitumoraux », s’est réjouit le Pr Bidard.
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